La mobilité internationale des retraités français s’accentue chaque année, soulevant des questions complexes en matière de fiscalité, notamment concernant le Plan d’Épargne Retraite (PER). Ce dispositif d’épargne, créé par la loi PACTE en 2019, présente des spécificités fiscales qui peuvent être significativement modifiées lors d’un départ à l’étranger. Entre conventions fiscales internationales, règles de domiciliation fiscale et modalités de rachat du PER, les retraités expatriés font face à un paysage fiscal particulier qui nécessite une analyse approfondie pour éviter les pièges et optimiser leur situation patrimoniale.
Les fondamentaux du PER et ses avantages fiscaux en France
Le Plan d’Épargne Retraite (PER) constitue un dispositif d’épargne longue durée destiné à préparer la retraite tout en bénéficiant d’avantages fiscaux substantiels. Instauré par la loi PACTE, ce produit financier vise à remplacer progressivement les anciens dispositifs comme le PERP, le contrat Madelin ou encore le PERCO.
En France, le principal attrait fiscal du PER réside dans la déductibilité des versements volontaires de l’assiette de l’impôt sur le revenu. Cette déduction s’effectue dans la limite d’un plafond global calculé en fonction des revenus professionnels. Pour un salarié, ce plafond correspond à 10% des revenus professionnels de l’année précédente, limité à 8 fois le Plafond Annuel de la Sécurité Sociale (PASS). Pour un travailleur non salarié, ce plafond peut atteindre 10% du PASS ou 15% de la rémunération entre 1 et 8 fois le PASS.
En contrepartie de cet avantage fiscal à l’entrée, les sommes sont en principe bloquées jusqu’à la retraite, sauf cas de déblocage anticipé prévus par la loi (achat de la résidence principale, invalidité, décès du conjoint, surendettement, etc.). À la sortie, les sommes issues des versements volontaires ayant bénéficié d’une déduction fiscale sont soumises à l’impôt sur le revenu selon le régime des rentes viagères à titre gratuit si la sortie s’effectue en rente, ou intégralement imposées au barème progressif si la sortie s’effectue en capital.
Il existe toutefois des nuances selon la nature des versements effectués sur le PER :
- Les versements volontaires ayant fait l’objet d’une déduction fiscale sont imposés à la sortie
- Les versements volontaires non déduits bénéficient d’une fiscalité allégée à la sortie (seuls les gains sont imposés)
- L’épargne salariale (participation, intéressement) transférée sur un PER est exonérée d’impôt sur le revenu à la sortie (seuls les prélèvements sociaux s’appliquent)
- Les versements obligatoires de l’employeur ou du salarié ne peuvent faire l’objet que d’une sortie en rente imposée selon le régime des rentes viagères à titre gratuit
Ce cadre fiscal avantageux en France peut être profondément modifié lorsque le détenteur du PER décide de s’expatrier pour sa retraite. La question fondamentale qui se pose alors est celle de la territorialité de l’impôt et des modalités d’imposition des sommes issues du PER dans un contexte international.
Les différents compartiments du PER et leur traitement fiscal
La structure compartimentée du PER joue un rôle déterminant dans le traitement fiscal des sommes épargnées. Le PER est divisé en trois compartiments distincts, chacun correspondant à une origine des fonds et soumis à des règles fiscales spécifiques :
Le compartiment 1 accueille les versements volontaires, déductibles ou non de l’assiette de l’impôt sur le revenu. Ce choix de déductibilité, effectué au moment du versement, aura des répercussions majeures lors de la sortie du plan, particulièrement en cas d’expatriation.
Le compartiment 2 est dédié à l’épargne salariale (intéressement, participation, abondement de l’employeur). Ces sommes, déjà exonérées d’impôt sur le revenu lors de leur versement sur le PER, conservent généralement ce caractère favorable lors de la sortie.
Le compartiment 3 rassemble les versements obligatoires du salarié ou de l’employeur, effectués dans le cadre de régimes de retraite supplémentaire à adhésion obligatoire. Ces sommes ne peuvent faire l’objet que d’une sortie en rente viagère.
La détermination de la résidence fiscale : un enjeu majeur pour les retraités expatriés
La question de la résidence fiscale constitue la pierre angulaire de toute stratégie d’optimisation fiscale liée au PER dans un contexte d’expatriation. La détermination du pays ayant le droit d’imposer les revenus issus du PER dépend en premier lieu des critères de résidence fiscale définis par la législation française, puis des dispositions prévues par les conventions fiscales internationales.
En droit fiscal français, l’article 4 B du Code général des impôts définit comme résident fiscal français toute personne qui remplit au moins l’un des critères suivants :
- Avoir son foyer en France ou son lieu de séjour principal
- Exercer une activité professionnelle en France, sauf si cette activité est accessoire
- Avoir le centre de ses intérêts économiques en France
Le critère du foyer fait référence au lieu où le contribuable réside habituellement avec sa famille. Le lieu de séjour principal est caractérisé par une présence en France supérieure à 183 jours au cours d’une année. Quant au centre des intérêts économiques, il correspond au lieu où le contribuable a réalisé ses principaux investissements, où il administre ses biens ou d’où il tire la majeure partie de ses revenus.
Lorsqu’un retraité s’établit à l’étranger, il doit analyser sa situation au regard de ces critères pour déterminer s’il conserve ou non sa qualité de résident fiscal français. Cette qualification a des conséquences directes sur l’imposition des sommes issues du PER.
Toutefois, il peut arriver qu’une personne soit considérée comme résidente fiscale dans deux pays simultanément, créant ainsi une situation de double résidence fiscale. C’est là qu’interviennent les conventions fiscales internationales, accords bilatéraux conclus entre la France et de nombreux pays pour éviter les doubles impositions.
Ces conventions prévoient généralement des critères hiérarchisés pour déterminer la résidence fiscale en cas de conflit entre les législations nationales :
- Le lieu du foyer d’habitation permanent
- Le centre des intérêts vitaux
- Le lieu de séjour habituel
- La nationalité
- Un accord amiable entre les administrations fiscales concernées
La convention fiscale applicable détermine ensuite quel État a le droit d’imposer quels types de revenus. Pour les revenus issus du PER, leur qualification fiscale (pension, revenu de capitaux mobiliers, plus-value) influence directement leur traitement conventionnel.
L’impact des conventions fiscales sur l’imposition des pensions
Les conventions fiscales adoptent généralement l’une des trois approches suivantes concernant l’imposition des pensions :
1. Imposition exclusive dans l’État de résidence : C’est le cas le plus fréquent. Les pensions perçues par un résident d’un État contractant ne sont imposables que dans cet État. Ainsi, un retraité français établi au Portugal sous le régime des Résidents Non Habituels (RNH) pourra, selon les termes de la convention franco-portugaise, voir ses pensions privées imposées uniquement au Portugal, qui leur applique une exonération totale sous certaines conditions.
2. Imposition exclusive dans l’État source : Certaines conventions prévoient que les pensions sont imposables exclusivement dans l’État d’où elles proviennent. C’est notamment le cas pour les pensions publiques, liées à des services rendus à un État.
3. Imposition partagée : Dans ce cas, l’État source peut imposer la pension, mais l’État de résidence conserve également un droit d’imposition, en accordant généralement un crédit d’impôt pour éviter la double imposition.
La qualification des sommes issues du PER en tant que pensions n’est toutefois pas systématique, particulièrement en cas de sortie en capital. Certaines administrations fiscales étrangères peuvent les considérer comme des revenus de capitaux mobiliers ou des plus-values, soumis à d’autres règles conventionnelles.
Le traitement fiscal du PER lors d’un départ à l’étranger : analyse par pays
Le traitement fiscal des sommes issues d’un PER varie considérablement selon le pays d’installation du retraité. Cette diversité résulte des différences entre les conventions fiscales signées par la France, mais aussi des particularités des systèmes fiscaux étrangers. Analysons la situation dans quelques destinations privilégiées des retraités français.
Le Portugal : un régime fiscal attractif en mutation
Le Portugal a longtemps constitué une destination fiscalement attractive pour les retraités français grâce à son régime des Résidents Non Habituels (RNH). Ce statut, accordé pour une période de dix ans, permettait jusqu’à récemment une exonération totale d’impôt sur les pensions d’origine étrangère.
Depuis 2020, le régime a été modifié : les pensions étrangères des RNH sont désormais soumises à un taux forfaitaire de 10%. Ce taux reste néanmoins avantageux comparé au barème progressif français qui peut atteindre 45%.
Concernant le PER, la convention fiscale franco-portugaise prévoit que les pensions sont imposables uniquement dans l’État de résidence. Ainsi, pour un retraité résident fiscal portugais :
- Les sorties en rente du PER seront qualifiées de pensions et imposées uniquement au Portugal au taux de 10% sous le régime RNH
- Les sorties en capital posent davantage de questions d’interprétation. L’administration fiscale portugaise tend à les qualifier également de pensions, les soumettant au même régime fiscal favorable
Il faut toutefois noter que la France conserve le droit d’imposer les revenus de source française des non-résidents. Si les sommes versées sur le PER ont bénéficié d’une déduction fiscale en France, l’administration fiscale française pourrait considérer qu’elle conserve un droit d’imposition sur ces sommes lors de leur sortie, créant un risque de double imposition.
L’Espagne : une fiscalité variable selon les régions
L’Espagne attire de nombreux retraités français, notamment dans les régions côtières et les îles. La convention fiscale franco-espagnole prévoit que les pensions privées sont imposables uniquement dans l’État de résidence du bénéficiaire.
Le système fiscal espagnol présente la particularité d’être partiellement décentralisé, avec des taux et des abattements qui peuvent varier selon les communautés autonomes. Certaines régions comme l’Andalousie ou la Communauté valencienne ont récemment allégé leur fiscalité pour attirer les contribuables fortunés.
Pour un détenteur de PER résidant fiscalement en Espagne :
- Les sorties en rente seront imposées selon le barème progressif espagnol de l’impôt sur le revenu (IRPF), qui varie de 19% à 47% selon les régions
- Les sorties en capital bénéficient généralement d’un régime d’étalement sur plusieurs années, atténuant la progressivité de l’impôt
L’Espagne applique par ailleurs un impôt sur la fortune (Impuesto sobre el Patrimonio) dans la plupart des communautés autonomes, susceptible de s’appliquer au capital constitué dans un PER avant sa liquidation.
L’Italie : le régime spécial des nouveaux résidents fiscaux
L’Italie a mis en place depuis 2017 un régime fiscal attractif pour attirer les retraités étrangers dans certaines régions du sud du pays (Sicile, Calabre, Pouilles, Campanie, Basilicate, Abruzzes, Molise et Sardaigne).
Ce régime permet aux nouveaux résidents fiscaux percevant une pension étrangère de bénéficier d’un taux forfaitaire de 7% sur tous leurs revenus de source étrangère pendant neuf ans, à condition de s’installer dans une commune de moins de 20 000 habitants située dans l’une des régions éligibles.
La convention fiscale franco-italienne prévoit que les pensions privées sont imposables exclusivement dans l’État de résidence du bénéficiaire. Pour un détenteur de PER bénéficiant du régime spécial italien :
- Les sorties en rente seraient soumises au taux forfaitaire de 7%
- Les sorties en capital pourraient bénéficier du même traitement favorable, sous réserve de leur qualification en tant que pension par l’administration fiscale italienne
Les pays hors Union Européenne : cas particuliers
Certains pays hors Union Européenne présentent des spécificités notables :
Au Maroc, la convention fiscale avec la France prévoit que les pensions privées sont imposables uniquement dans l’État de résidence. Le Maroc exonère toutefois d’impôt les pensions de source étrangère transférées définitivement en dirhams non convertibles.
En Thaïlande, les pensions de source étrangère ne sont pas imposables si elles ne sont pas transférées dans le pays au cours de l’année fiscale concernée.
À Maurice, un taux forfaitaire de 15% s’applique sur les revenus, avec possibilité d’opter pour une imposition limitée aux revenus de source mauricienne pour les résidents étrangers.
Ces exemples illustrent l’importance d’une analyse approfondie de la convention fiscale applicable et du système fiscal local avant de choisir sa destination de retraite.
Stratégies d’optimisation fiscale pour les détenteurs de PER souhaitant s’expatrier
Face à la complexité des interactions entre les systèmes fiscaux français et étrangers, plusieurs stratégies d’optimisation peuvent être envisagées par les détenteurs de PER souhaitant s’expatrier. Ces stratégies doivent être élaborées bien en amont du départ pour maximiser leur efficacité.
Le timing optimal du rachat du PER
Le moment choisi pour effectuer le rachat du PER constitue un élément déterminant de la stratégie fiscale globale. Trois options principales se présentent :
Rachat avant le départ de France : Cette option permet de clôturer la situation fiscale en France avant l’expatriation. Les sommes issues du PER seront imposées selon les règles fiscales françaises. L’avantage principal réside dans la clarté des règles applicables et l’absence de conflit potentiel entre administrations fiscales. L’inconvénient majeur est la perte des avantages fiscaux potentiels offerts par certains pays d’accueil.
Rachat après établissement de la résidence fiscale à l’étranger : Cette stratégie vise à bénéficier d’une fiscalité potentiellement plus avantageuse dans le pays d’accueil. Son efficacité dépend largement des dispositions de la convention fiscale applicable et de l’interprétation qu’en font les administrations fiscales concernées. Le risque principal est celui d’une requalification par l’administration fiscale française, qui pourrait considérer que les sommes déduites de l’impôt en France doivent y être imposées lors de leur sortie.
Rachat échelonné : Cette approche consiste à fractionner les rachats dans le temps pour optimiser la pression fiscale globale. Elle peut permettre de bénéficier de tranches d’imposition plus favorables ou de répartir les revenus entre deux juridictions fiscales. Cette stratégie s’avère particulièrement pertinente lorsque le pays d’accueil applique un barème progressif d’imposition.
La gestion des différents compartiments du PER
La structure compartimentée du PER offre des opportunités d’optimisation fiscale spécifiques dans un contexte d’expatriation :
Pour le compartiment 1 (versements volontaires), il peut être judicieux d’arbitrer entre versements déductibles et non déductibles en fonction du projet d’expatriation. Les versements non déduits seront moins susceptibles d’être requalifiés par l’administration fiscale française après un départ à l’étranger.
Le compartiment 2 (épargne salariale) présente généralement un profil fiscal favorable, étant déjà exonéré d’impôt sur le revenu à l’entrée. Sa sortie en capital après établissement de la résidence fiscale à l’étranger peut constituer une stratégie avantageuse.
Le compartiment 3 (versements obligatoires) impose une sortie en rente, ce qui limite les options d’optimisation. Néanmoins, la rente peut bénéficier de régimes fiscaux favorables dans certains pays d’accueil.
L’arbitrage entre sortie en rente et sortie en capital
Le choix entre une sortie en rente viagère ou en capital représente un levier d’optimisation majeur :
La sortie en rente bénéficie généralement d’une qualification claire en tant que pension dans les conventions fiscales, ce qui peut sécuriser son traitement fiscal à l’étranger. Elle permet également un étalement de l’imposition dans le temps, limitant l’impact de la progressivité de l’impôt. En revanche, elle offre moins de flexibilité patrimoniale et peut être défavorable en cas de décès précoce.
La sortie en capital offre une liberté d’utilisation immédiate des fonds et peut être avantageuse dans les pays qui appliquent un traitement fiscal favorable aux capitaux par rapport aux revenus réguliers. Son traitement conventionnel est toutefois moins prévisible, certaines administrations fiscales pouvant la qualifier de revenu de capitaux mobiliers plutôt que de pension.
Une approche mixte, combinant une sortie partielle en capital et une conversion du solde en rente, peut constituer un compromis optimal dans de nombreuses situations.
La planification patrimoniale globale
L’optimisation fiscale du PER doit s’inscrire dans une réflexion patrimoniale plus large, intégrant notamment :
- La diversification des placements entre différents véhicules d’épargne (assurance-vie, immobilier, valeurs mobilières) pour répartir les risques fiscaux
- La prise en compte des règles successorales françaises et étrangères, qui peuvent impacter la transmission du patrimoine
- L’anticipation des évolutions législatives, tant en France que dans le pays d’accueil
- La gestion des autres revenus de source française (revenus fonciers, dividendes, etc.) qui resteront potentiellement imposables en France malgré l’expatriation
Cette planification patrimoniale doit idéalement être réalisée avec l’accompagnement d’un conseiller spécialisé en fiscalité internationale, capable d’appréhender les subtilités des différents systèmes fiscaux en présence.
Aspects pratiques et précautions à prendre pour sécuriser sa situation fiscale
Au-delà des stratégies d’optimisation, la sécurisation juridique et fiscale de sa situation constitue un enjeu majeur pour tout détenteur de PER envisageant une expatriation. Plusieurs démarches et précautions s’avèrent indispensables pour éviter les contentieux fiscaux ultérieurs.
Les obligations déclaratives en France et à l’étranger
Le départ de France s’accompagne d’obligations déclaratives spécifiques qui ne doivent pas être négligées :
La déclaration de transfert de domicile fiscal (formulaire n°2042-C) doit être déposée auprès du Service des Impôts des Particuliers (SIP) dont dépend le contribuable, dans les 60 jours précédant son départ. Cette déclaration permet de régulariser sa situation fiscale en France et d’informer l’administration de son changement de statut.
La déclaration des comptes d’actifs financiers et des contrats d’assurance-vie détenus à l’étranger (formulaire n°3916) reste obligatoire pour les contribuables qui, bien que non-résidents, conservent des obligations fiscales en France. Le PER étant géré par un établissement français, il n’est généralement pas concerné par cette obligation.
La déclaration des revenus de l’année du départ doit être établie selon des modalités particulières, avec un découpage prorata temporis entre la période de résidence et de non-résidence fiscale en France.
Dans le pays d’accueil, le nouveau résident doit généralement s’enregistrer auprès de l’administration fiscale locale et se conformer aux obligations déclaratives en vigueur. Ces démarches peuvent inclure :
- L’obtention d’un numéro d’identification fiscale local
- La déclaration des revenus mondiaux ou, selon les pays, des seuls revenus de source locale
- La déclaration spécifique des avoirs détenus à l’étranger, dont le PER
Le non-respect de ces obligations peut entraîner des sanctions financières significatives et compromettre le bénéfice de certains régimes fiscaux favorables.
La sécurisation juridique de sa situation fiscale
Face aux incertitudes d’interprétation qui peuvent survenir, plusieurs outils permettent de sécuriser sa situation fiscale :
Le rescrit fiscal constitue un moyen efficace d’obtenir une position formelle de l’administration fiscale sur le traitement applicable à une situation particulière. En France, cette procédure permet d’interroger l’administration sur l’application des conventions fiscales internationales aux sommes issues du PER. Dans de nombreux pays d’accueil, des procédures similaires existent.
Les certificats de résidence fiscale délivrés par les administrations concernées permettent de matérialiser sa situation de résident fiscal d’un État, facilitant l’application des dispositions conventionnelles.
La procédure amiable prévue par la plupart des conventions fiscales offre un recours en cas de double imposition résultant d’une interprétation divergente entre administrations fiscales. Cette procédure, bien que parfois longue, permet généralement d’aboutir à une solution équitable.
La gestion des risques de redressement fiscal
Malgré les précautions prises, le risque de contestation par l’une ou l’autre des administrations fiscales ne peut être totalement écarté. Plusieurs aspects méritent une vigilance particulière :
La qualification des sommes issues du PER peut faire l’objet d’interprétations divergentes entre administrations fiscales. L’administration française pourrait considérer que les sommes ayant bénéficié d’une déduction fiscale en France doivent y être imposées lors de leur sortie, tandis que l’administration étrangère pourrait revendiquer un droit d’imposition en tant qu’État de résidence.
Le risque d’abus de droit peut être invoqué si l’expatriation apparaît motivée exclusivement par des considérations fiscales, sans réalité économique ou personnelle. Pour limiter ce risque, il est recommandé de pouvoir justifier de raisons non fiscales à l’expatriation (rapprochement familial, projet de vie, etc.) et de démontrer l’effectivité de son installation à l’étranger (bail ou acte d’achat d’une résidence, factures d’électricité, immatriculation auprès des services locaux, etc.).
Les délais de prescription varient selon les juridictions et les types d’infractions fiscales présumées. En France, le délai de droit commun est de trois ans, mais il peut être étendu à dix ans en cas de fraude fiscale. Il est donc prudent de conserver tous les justificatifs relatifs à sa situation fiscale pendant une durée suffisante.
L’accompagnement par des professionnels spécialisés
La complexité des questions fiscales internationales justifie pleinement le recours à des professionnels spécialisés :
Un avocat fiscaliste spécialisé en fiscalité internationale peut conseiller sur la stratégie globale d’expatriation, l’interprétation des conventions fiscales et la sécurisation juridique de sa situation.
Un conseiller en gestion de patrimoine ayant une expertise internationale aide à optimiser la structure patrimoniale globale, en tenant compte des spécificités fiscales des différents pays concernés.
Un expert-comptable local dans le pays d’accueil facilite la conformité avec les obligations déclaratives locales et peut représenter le contribuable auprès de l’administration fiscale étrangère.
Ces professionnels peuvent travailler en réseau pour offrir une vision cohérente et coordonnée, évitant les approches fragmentées qui pourraient générer des contradictions ou des angles morts dans la stratégie fiscale.
Perspectives d’évolution et adaptation de sa stratégie dans le temps
La fiscalité internationale est un domaine en constante évolution, influencé par les changements législatifs nationaux, les renégociations de conventions fiscales et les initiatives de coopération fiscale internationale. Pour les détenteurs de PER expatriés, l’adaptation continue de leur stratégie s’avère indispensable.
Les évolutions récentes et à venir du cadre fiscal international
Plusieurs tendances de fond transforment progressivement le paysage fiscal international :
L’échange automatique d’informations financières entre administrations fiscales, mis en œuvre dans le cadre de la norme commune de déclaration (NCD) de l’OCDE, a considérablement réduit les possibilités de non-déclaration d’avoirs détenus à l’étranger. Les établissements financiers français communiquent désormais automatiquement aux administrations fiscales étrangères les informations relatives aux comptes détenus par leurs résidents, y compris les PER.
La lutte contre l’optimisation fiscale agressive s’intensifie au niveau international, avec l’adoption de mesures issues du projet BEPS (Base Erosion and Profit Shifting) de l’OCDE. Bien que principalement ciblées sur les entreprises multinationales, ces mesures reflètent une tendance générale de durcissement vis-à-vis des stratégies fiscales considérées comme abusives.
Les renégociations de conventions fiscales constituent un facteur d’incertitude majeur. Plusieurs pays traditionnellement attractifs pour les retraités français ont récemment modifié leur régime fiscal ou renégocié leur convention avec la France. Le Portugal a ainsi introduit une imposition des pensions étrangères à 10% pour les RNH, tandis que la convention franco-suisse a été amendée concernant l’imposition des frontaliers.
L’harmonisation fiscale européenne, bien que limitée par le principe d’unanimité en matière fiscale, progresse sur certains aspects comme la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Des initiatives comme la directive DAC6 imposent désormais la déclaration de certains schémas d’optimisation fiscale transfrontaliers.
La nécessité d’une veille fiscale et d’une adaptation continue
Face à ces évolutions, une veille fiscale active s’impose pour les détenteurs de PER expatriés :
Le suivi des modifications législatives, tant en France que dans le pays de résidence, permet d’anticiper les changements susceptibles d’affecter sa situation fiscale. Les lois de finances annuelles, en particulier, peuvent introduire des dispositions impactant les non-résidents ou les produits d’épargne retraite.
L’attention aux renégociations de conventions fiscales est primordiale, ces instruments déterminant la répartition des droits d’imposition entre États. L’annonce de négociations entre la France et le pays de résidence doit alerter sur de possibles changements à venir.
La réévaluation périodique de sa stratégie fiscale, idéalement avec l’aide de conseillers spécialisés, permet d’intégrer ces évolutions et d’ajuster ses choix en conséquence. Cette réévaluation peut conduire à modifier le rythme des rachats du PER, à envisager un changement de pays de résidence, ou à restructurer plus largement son patrimoine.
Les alternatives et compléments au PER dans un contexte international
Le PER n’est qu’un élément d’une stratégie patrimoniale globale. D’autres véhicules d’épargne peuvent présenter des avantages spécifiques dans un contexte d’expatriation :
L’assurance-vie française conserve des atouts significatifs pour les non-résidents, notamment en matière de transmission patrimoniale. Les contrats souscrits avant l’expatriation continuent de bénéficier du cadre fiscal français pour les successions, indépendamment de la résidence fiscale du souscripteur au moment de son décès.
Les contrats d’assurance-vie luxembourgeois offrent une grande flexibilité dans la gestion des actifs sous-jacents et bénéficient du triangle de sécurité luxembourgeois, qui protège les avoirs des assurés en cas de défaillance de l’assureur. Ils peuvent constituer un complément intéressant au PER pour les expatriés disposant d’un patrimoine significatif.
Les investissements immobiliers, en France ou dans le pays de résidence, représentent une classe d’actifs tangible dont le traitement fiscal est généralement clairement défini par les conventions fiscales. Ils peuvent offrir une source de revenus complémentaires à la retraite, avec des modalités d’imposition prévisibles.
Les produits de retraite locaux du pays d’accueil peuvent dans certains cas offrir des avantages fiscaux spécifiques aux résidents. Une analyse comparative avec le PER français peut s’avérer pertinente dans une logique d’optimisation fiscale globale.
La préparation de la transmission patrimoniale
La dimension successorale ne doit pas être négligée dans la stratégie fiscale globale liée au PER :
Le droit applicable à la succession est déterminé, au sein de l’Union Européenne, par le Règlement européen sur les successions (n°650/2012). Ce texte prévoit l’application de la loi de la dernière résidence habituelle du défunt, sauf choix exprès de sa loi nationale. Ce choix peut avoir des implications significatives sur les règles de réserve héréditaire applicables.
La fiscalité successorale reste quant à elle déterminée par les conventions fiscales bilatérales ou, à défaut, par les droits internes des pays concernés. Pour les expatriés français, il est fondamental de comprendre comment seront imposés les différents éléments de leur patrimoine, y compris le capital restant dans un PER, en cas de décès.
Des outils de planification successorale spécifiques peuvent être envisagés en fonction de la situation familiale et patrimoniale : testament, donation au dernier vivant, démembrement de propriété, création de structure patrimoniale, etc. Ces outils doivent être adaptés au contexte international particulier de l’expatrié.
La réflexion sur la transmission patrimoniale doit idéalement être menée en parallèle des choix relatifs à la liquidation du PER, ces deux dimensions étant étroitement liées dans une approche patrimoniale globale.
